Sources de croissance : quelles sont les trois principales ?

4,7 % : c’est le rythme de croissance annuel qu’a connu la Chine entre 2000 et 2020, alors que le Japon n’atteignait pas 1 %. Les moteurs de la croissance économique n’appliquent aucune règle universelle : chaque pays, chaque époque bricole sa propre recette, rarement stable, toujours évolutive.

Dans ce paysage mouvant, les gouvernements cherchent parfois à compenser la faiblesse d’un moteur en appuyant sur un autre levier. Mais les résultats ne tiennent pas toujours sur la durée. Pour comprendre les véritables ressorts de la croissance, il faut s’en tenir aux fondements qui structurent l’analyse économique depuis des décennies.

Comprendre la croissance économique : un enjeu central pour les sociétés modernes

La croissance économique demeure la boussole des politiques publiques d’aujourd’hui. Elle correspond à l’augmentation régulière de la production sur plusieurs années, mesurée par un indicateur incontournable : le PIB (produit intérieur brut). Ce chiffre, qui additionne toutes les valeurs ajoutées créées au sein d’une économie, permet de suivre d’une année sur l’autre le fameux taux de croissance. Un chiffre qui fait la pluie et le beau temps dans les couloirs des ministères, car il pèse lourd sur l’évolution du niveau de vie.

Pour y voir plus clair, le PIB par habitant affine les comparaisons. Il aide à évaluer le niveau de vie d’un pays, et le PIB en parité de pouvoir d’achat (PPA) corrige les décalages de prix pour mieux situer chaque économie dans la course. Mais cet indicateur ne dit pas tout. Il ignore la qualité de vie, la répartition des richesses, l’impact environnemental. Face à ces limites, des outils plus complets ont émergé, notamment sous l’impulsion de l’Organisation des Nations unies. L’IDH (Indice de Développement Humain), conçu par le PNUD, croise santé, éducation et revenus pour offrir une vision élargie du progrès.

La croissance économique ne se réduit donc pas à la progression du PIB. Les discussions autour du PIB vert traduisent une prise de conscience : désormais, il faut aussi intégrer les conséquences écologiques dans l’évaluation de la performance. L’économie française, comme tant d’autres, est sommée de tenir compte de ces nouveaux critères afin d’apprécier la viabilité de sa croissance.

Quels sont les trois piliers de la croissance ? Travail, capital et innovation à la loupe

Trois forces, indissociables, forment l’ossature de la croissance depuis la révolution industrielle : travail, capital et innovation. Le facteur travail mobilise la main-d’œuvre, le savoir-faire, le niveau de formation. En France, l’amélioration du capital humain, par l’éducation, la santé, les compétences, élève la productivité collective. Les démographes auscultent la population active, les économistes scrutent la montée en qualification.

Le facteur capital englobe tout ce qui sert à produire : machines, infrastructures, bâtiments, mais aussi capital immatériel : logiciels, brevets, travaux de recherche. L’investissement alimente cette accumulation, poussant la croissance potentielle vers le haut. Le capital public, à travers les routes, les réseaux, les écoles, façonne le terrain de jeu économique. Longtemps ignoré, le capital naturel intègre aujourd’hui le débat, impossible de le laisser de côté.

Le troisième pilier, la productivité globale des facteurs (PGF), condense tout ce que ni le travail, ni le capital, ne suffisent à expliquer. C’est là que s’invite l’innovation, stimulée par le progrès technique et l’évolution des modes d’organisation. La diffusion des inventions, l’adoption des nouvelles technologies, la transformation des méthodes de gestion : tout concourt à doper les gains de productivité. En France comme ailleurs, cette énergie créative est recherchée pour éviter l’essoufflement de l’économie.

Croissance extensive et croissance intensive : quelles différences et implications ?

Cette distinction reste un repère central pour comprendre les trajectoires économiques. La croissance extensive repose sur l’accumulation des quantités de facteurs mobilisés dans l’appareil productif. Voici ce qui la caractérise :

  • Augmenter le nombre de machines, embaucher plus de personnes : la production avance mécaniquement, sans bouleversement technologique.

On retrouve ce schéma à l’œuvre lors des grandes phases d’industrialisation, comme pendant les Trente Glorieuses en France, ou lors des premières révolutions industrielles.

Avec la croissance intensive, on change d’approche. Ici, tout se joue sur l’amélioration de la productivité : produire davantage sans augmenter les ressources mobilisées. Les leviers sont multiples :

  • Le progrès technique, l’innovation dans l’organisation ou encore la diffusion du savoir permettent de dépasser la logique des rendements décroissants.

Les théories de la croissance endogène, portées par Paul Romer, insistent d’ailleurs sur le rôle déterminant de l’accumulation de capital humain et immatériel, qui permet des rendements d’échelle croissants.

Croissance extensive Croissance intensive
Logique Accumulation quantitative Progrès qualitatif
Limites Rendements décroissants Effet d’entraînement par l’innovation

La dynamique de destruction créatrice, chère à Schumpeter, renouvelle sans cesse le paysage économique. L’innovation balaie les anciens procédés, bouleverse les modèles établis, crée à la fois croissance et instabilité. Les cycles économiques, Kondratiev, Juglar, Kitchin, illustrent cette succession de ruptures et de renouveaux, propre à la croissance intensive.

Trois professionnels devant la ville symbolisant innovation et teamwork

Le rôle des politiques économiques dans la dynamique de la croissance

La croissance économique se construit sur un terrain balisé par les institutions : droits de propriété, stabilité politique, règles du jeu claires. Ces socles créent un climat de confiance, incitent à investir, protègent l’innovation. Sans eux, ni capital ni progrès ne peuvent s’inscrire dans la durée.

Le développement durable oblige désormais à repenser la trajectoire. Produire plus, c’est aussi générer des externalités négatives : pollution, raréfaction des ressources, dérèglement climatique. Les politiques publiques doivent intégrer la préservation de l’environnement, limiter l’empreinte écologique, protéger les biens communs. Il s’agit de ne plus ignorer les limites de la planète.

La question de la croissance inclusive est désormais sur toutes les lèvres. Faire grimper le PIB n’a plus rien d’un objectif suffisant. Lorsque les écarts se creusent, que certains territoires décrochent, l’État doit veiller à une meilleure répartition, investir dans le capital humain, c’est-à-dire dans l’éducation, la santé, la formation. C’est ainsi que la productivité s’accroît et que les fruits de la croissance peuvent profiter à tous.

Les chocs d’offre et chocs de demande rappellent que l’équilibre reste fragile. Une pandémie, une crise géopolitique, une rupture d’approvisionnement : et tout peut basculer. Les politiques économiques, qu’elles soient monétaires ou budgétaires, jouent alors un rôle de tampon, soutenant la demande ou réorientant l’offre selon les urgences du moment. La croissance n’est jamais acquise une fois pour toutes : elle s’écrit, à chaque époque, au fil des choix collectifs.

En fin de compte, la croissance ne se décide ni dans les manuels ni dans les discours. Elle se façonne, de compromis en ruptures, à la croisée des stratégies nationales et des défis planétaires. À chacun de voir où placer le curseur, et comment façonner le prochain chapitre.

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